"Cendres sur les mains" La femme qui murmurait à l'oreille des morts Dead Can Dance: "Les morts peuvent danser"! Beauté, Lisa Gerrard est ma chanteuse préférée… J'ai assisté à la représentation de "Cendres sur les mains" sans avoir pris le temps de me renseigner. Bien m'en a pris! Par les temps qui courent, j'aurais pu penser que ce spectacle allait ajouter au blues de la saison et au retour des contaminations, encore un peu plus de dépression. Et non! Ce que je retiens, c'est d'abord une voix, celle de Prisca Lona. Envoûtante et habitée. Comme celle de Lisa Gerrard que je cite plus haut et à qui, un temps, elle m'a fait penser. Prisca Lona, la silhouette fine, le costume taillé sur mesure et la beauté lumineuse rattrapée par la bougie dans une semi-obscurité. Une "survivante" revenue des morts… de la mort. Puis, progressivement, le plateau s'ouvre et s'éclaire juste un peu plus devant nous. Des sacs portés par deux hommes. Andromaque acte 5 scène 4.2. Un duo. Ils pourraient être frères tant leur ressemblance physique est frappante.
Je me souviens d'un ballet-poème exécutés par Christian Foye et Marina De Berg, alors débutants. Dans un coin de la scène je disais alors les Rocs, ce magnifique poème de Guillevic. Je renouvelai l'expérience au théâtre Sarah-Bernhardt avec un poème de Rimbaud. C'est à l'un de ces récitals qu'il arriva à Gérard une des plus grandes mésaventures de sa carrière. Il devait jouer avec Maria Casarès une scène de Phèdre dansée par Renée Jeanmaire, la future Zizi, et Roland Petit. Sur ces vers de Racine, les deux danseurs mimaient chaque phrase, sur une chorégraphie adaptée minutieusement à chaque mot. "Britannicus" Ou comment rendre compte de la naissance d'un monstre. Soudain Gérard eut un trou noir. Il fallut s'arrêter et reprendre. Au même endroit, au même vers, de nouveau le trou. Dans le silence terrible de la salle Pleyel archicomble, le ballet racinien recommença. De nouveau le trou. Gérard s'enfuit dans les coulisses, hors du théâtre, en larmes. » ( Deux ou trois vies qui sont les miennes, Presses Pocket, 1978, p. 98. ) La mémoire de Daniel Gélin lui a-t-elle joué un tour?
Gageure difficile à gagner, car le rythme poétique n'a pas les avantages chorégraphiques qu'offre parfois le rythme musical. Lorsqu'on se trouve devant des mètres précis comme dans Baudelaire, devant de souples battements d'ailes comme dans Verlaine, il est difficile au corps humain de s'adapter à ces cadences. L'illustration chorégraphique peut alors assez facilement être nuisible aux poèmes (dont l'acteur peut être tenté de ralentir le débit), ou bien elle peut être inutile. Parfois, au contraire, lorsque le poème, sans recherche de rythme, est tout expression sentimentale, la danse peut lui apporter une traduction valable, ainsi la Nuit d'août de Musset, transcrite par Lifar. Il peut arriver aussi qu'un poète écrive avec la pensée ou l'arrière-pensée d'une traduction plastique. Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine. Tel fut le cas d'un poème de Maurice Rostand, Les Trois Danseuses. Serge Lifar a fait appel à des ressources très diverses de l'art chorégraphique, par exemple, pour l'Abeille de Paul Valéry, les entrechats classiques, exécutés par M. Fenonjois, étaient tout à fait à leur place.
Certaines de ses créations ont obtenu un succès retentissant. Cette fois-ci, M. Lifar présentera sur la scène de la Comédie des Champs-Élysées un programme de 12 danses qui est un véritable bilan de son expérience. Les meilleurs comédiens de Paris prêteront leur concours à cette séance où la musique est exclue: Maurice Escande, Jean Marchat, Renaud Marie, Gérard Philippe ( sic), Tony Taffin, Gaston Girard, ainsi que Mlle Clarisse Deudon et Marguerite Daney. Les chorégraphies de Lifar seront interprétées par les meilleurs danseurs de l'Opéra: Yvette Chauvire, Dinalix, Bardin. Lafon, Colette Marchand, ainsi que MM. Fenonjois, Roland Petit, Christian Foye, Serge Perrault. Janine Charrat, qui a été la première interprète des poèmes dansés, y reprendra ses plus grands succès. Athalie Jean Racine | Théâtre XVIIème siècle. Cette séance nous réserve également la révélation de deux toutes Jeunes danseuses: Nathalie Philippart, Irène Skorik. » ( L'Œuvre, 3 juin 1944) Le compte rendu de L'Œuvre, s'il rend bien compte de l'ambiance générale, ne se penche guère sur ces poèmes dansés du soir: « Hier s'est déroulée au Théâtre des Champs-Élysées la " Merveilleuse journée des Champs-Élysées " organisée au profit des sinistrés et réfugiés de Seine-et-Oise.
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